dimanche 18 mars 2012

Grâce à l'OAM, la capacité des réseaux sans fil va-t-elle exploser ?

Une révolution en perspective pour les réseaux sans fil ? Peut-être : une équipe de chercheurs suédois et italiens vient en effet de présenter un nouveau moyen de transmettre des informations par radio, permettant d'exploiter sur une même fréquence une multitude de canaux, voire, en théorie du moins, une infinité... Comment faire ? En tordant les ondes comme des pâtes fusilli, explique à Futura-Sciences un chercheur italien membre de l'équipe.

Il suffit d’essayer d’envoyer plusieurs SMS à minuit le 1er janvier pour se rendre compte du problème de l’engorgement des ondes radio. Et ce n’est qu’un début, puisqu’avec la multiplication des smartphones et la mise en place de la TNT, les bandes de fréquences radio risquent de rapidement saturer.

Pour augmenter la capacité de transmission, le seul moyen actuellement disponible est d'élargir les bandes de fréquences. Mais la méthode trouve ses limites quand, à force d'inflation, ces bandes réservées à différents utilisateurs (3G, militaires, aéronautique...) menacent de se superposer.

Depuis quelque temps, des scientifiques planchent sur un autre procédé pour moduler des ondes radio, un peu comme si l'on exploitait une dimension supplémentaire. Longtemps resté une possibilité théorique, l'exploit vient d'être réalisé lors d'une véritable transmission radio par une équipe de scientifiques italiens et suédois. De quoi bouleverser l’univers du sans-fil dans les prochaines années et, pourquoi pas, rendre possible le visionnage de vidéos en 3D et en HD sur les smartphones.

Comment ? « En donnant aux ondes une forme torsadée, à l'aspect d'une pâte fusilli », a expliqué à Futura-Sciences, Fabrizio Tamburini, docteur à l’université de Padoue, en Italie, qui porte le projet. La forme de l’onde est générée par une antenne hélicoïdale parabolique. L’onde est enroulée autour de son axe plusieurs fois dans le sens des aiguilles d'une montre. Au final, représentées en 3D, ces ondes ressemblent effectivement à des pâtes de blé torsadées, autrement dit, des fusilli.

Le moment angulaire orbital : clé du système

Modeste, le chercheur précise que finalement, les scientifiques n’ont pas inventé grand-chose : « Il ne s’agit pas de techniques difficiles mais uniquement d'une autre façon de réfléchir sur les lois physiques de base. ». Cette technique repose en effet sur un phénomène de physique quantique connu. Les photons, vecteurs des ondes électromagnétiques, peuvent présenter un moment angulaire supplémentaire, appelé moment angulaire orbital, ou OAM, pour Orbital Angular Momentum. Un peu comme si les ondes tournaient sur elles-mêmes. Dans un même faisceau, de fréquence unique, plusieurs photons peuvent présenter des OAM différents. Si on parvient à moduler indépendamment plusieurs ondes présentant des OAM différents, on peut encoder autant de signaux. D'où la possibilité de créer plusieurs canaux sur une même bande de fréquence.

Découvert dans les années 1930 sur le plan théorique, cet OAM est resté longtemps hors de portée des technologies. Depuis quelques années, on commence à savoir le maîtriser et donc à le moduler.

Pour expérimenter cette théorie, les chercheurs ont effectué une démonstration publique devant 2.000 personnes... à Venise, une ville idéale pour présenter une multiplication des canaux. L'endroit a été choisi pour des raisons historiques : c'est là que Guglielmo Marconi a effectué plusieurs expériences de radiotransmission entre Venise et son yacht, l'Elettra.


Franchissant 442 mètres, l'émission transmettait un faisceau d'« ondes fusilli » sur une unique bande de fréquence étroite, à 2,414 GHz mais avec deux canaux. L'une des ondes était « tordue » et l'autre présentait un OAM nul. Entre l'île de San Giorgio et le palais des Doges, l’antenne de réception a pu capter les deux flux d'ondes, l'une transportant l'image de barres colorées, l'autre de la baie. Il suffisait, pour passer de l'une à l'autre, de bouger la petite antenne du récepteur. On peut regarder la vidéo de l'expérience (en anglais) sur le site du New Journal of Physics, où les résultats ont été publiés.

Lorsqu’on l'interroge sur l’avenir de cette découverte, Fabrizio Tamburini dit y croire vraiment. Il indique même qu’un brevet a déjà été déposé et que plusieurs entreprises souhaitent investir dans le développement de ces recherches.

vendredi 16 mars 2012

Les neutrinos ne vont pas plus vite que la lumière

SCIENCES – Le CERN l'a confirmé, vendredi...


L'excès de vitesse est donc bel et bien oublié. Les neutrinos mesurés cet automne par l'expérience Opera n'allaient pas plus vite que la lumière, selon les calculs effectués par une autre équipe pour tenter d'élucider ce résultat qui remettait en cause la physique d'Einstein, a annoncé vendredi le CERN.
Cette nouvelle mesure indique que les neutrinos n'ont pas dépassé la vitesse de la lumière, écrit dans un communiqué le Centre européen de recherches nucléaires (CERN). «Il commence à y avoir des présomptions selon lesquelles les résultats d'Opera seraient liés à une erreur de mesure», estime le directeur de recherches du CERN Sergio Bertolucci. «Mais il est important d'être rigoureux», ajoute-t-il, soulignant que plusieurs autres équipes du CERN vont réaliser des mesures en mai «afin d'aboutir à un verdict définitif».
Quels que soient les résultats qui seront obtenus, l'équipe d'Opera «s'est comportée avec une parfaite intégrité scientifique en soumettant ses mesures au plus grand nombre et en appelant à faire des mesures indépendantes. C'est ainsi que la science fonctionne», insiste Bertolucci.
L'annonce fin septembre des mesures de l'expérience Opera, en contradiction avec la théorie de relativité d'Einstein, avait secoué les physiciens, toujours nombreux à douter de leur validité.

60 nanosecondes d'écart

Sur une «course de fond» de 730 km entre les installations du Cern à Genève et le laboratoire souterrain de Gran Sasso (Italie), les neutrinos, des particules élémentaires, franchissaient la ligne d'arrivée avec près de 20 mètres (ou 60 nanosecondes) d'avance sur la lumière, selon les mesures effectuées par Opera.
Des résultats si surprenants que, pour tenter d'éliminer une possible source d'erreurs, l'équipe d'Opera avait procédé à des tests complémentaires fin octobre. Elle avait là encore abouti à une vitesse des neutrinos supérieure à celle de la lumière.
Les données récoltées lors de ces tests complémentaires ont été à leur tour analysées par ICARUS, une autre expérience du CERN utilisant une technique de pointe. «Selon les mesures d'ICARUS, la vitesse des neutrinos ne dépasse pas celle de la lumière», résume Carlo Rubbia, porte-parole de l'expérience et prix Nobel de physique.
Fin février, des physiciens avaient émis l'hypothèse que le résultat inattendu d'Opera avait été faussé par une mauvaise connexion entre un GPS et un ordinateur. Il en aurait résulté une mauvaise synchronisation entre les horloges utilisées par Opera, donc un décalage aboutissant à une mesure erronée de la vitesse des neutrinos.
Les nouveaux tests du printemps prochain devraient dire s'il s'agissait d'un simple problème de connexion ou s'il y a lieu de repenser toute la physique actuelle.
© 2012 AFP